On n’a qu’à bien se tenir !
On n’a qu’à bien se tenir !
Une posture inclusive consiste en une façon d’être et d’envisager sa place en tant que professionnel·le dans le rapport de soins et d’accompagnement des patient·es appartenant à des groupes minoritaires.
Cela revient à développer une attitude qui puisse garantir un accueil et un accompagnement bienveillants et adaptés aux situations, vulnérabilités et demandes spécifiques des publics minorisés.
« La façon dont la personne s’adresse à moi va avoir un impact sur ce que je vais dire ou ne pas dire (questions ouvertes, pronoms, etc.). » (1)
Ci-après quelques éléments clés et points de vigilances précisant les bases d’une approche inclusive :
- Le respect des diversités et des minorités inclut nécessairement une vigilance constante à ne pas adopter une approche normalisante qui oriente l’individu à se placer dans la norme socialement admise et au respect de la liberté d’autodétermination.
- Il s’agit également d’adopter une posture de non-savoir à propos du vécu de la personne. Ne pas présupposer ce qui est (en termes d’identités, d’orientations, de façon d’envisager les relations) ni ce qui devrait être (en termes d’objectifs thérapeutiques, de traitements, etc.).
Pour Dr. Chaline Marbaix, il s’agit de « sortir de sa tour d’ivoire et tendre vers une horizontalité des savoirs c’est-à-dire inclure la patientèle dans le savoir et la considérer comme experte de son vécu » .
- Encourager l’authenticité en garantissant un climat qui puisse le permettre par l’instauration générale d’un climat bienveillant et par la construction d’un lien de confiance adapté.
- Veiller à considérer les vulnérabilités spécifiques comme des points de vigilances particulières.
- S’informer et se former aux vécus et besoins spécifiques sans estimer qu’une formation ou que la consultation d’un outil puisse suffir à faire de soi un·e expert·e et veillant à exercer un regard critique sur les informations reçues. Ne pas confondre sensibilisation et stigmatisation en veillant à ce que le contenu d’une action de sensibilisation ou d’information n’ait pas pour effet de stigmatiser un public en l’enfermant dans une réalité unique, théorique ou dégradante.
- (Ré)apprendre ce qui peut sembler « évident », « naturel » ou « normal ».
- Une posture inclusive implique une remise en question de sa pratique et de ses propres biais (individuellement et en équipe). Il s’agit d’exercer un regard critique sur soi-même et sur sa pratique.
- Il s’agit donc d’examiner son propre cadre normatif de références et éventuellement, de se faire accompagner dans ce processus (par des personnes concernées, par des formations adéquates, etc. ).
- Maintenir une vigilance quant aux (micro-)agressions ou (micro-)conversions souvent invisibles, inconscientes et sans volonté de nuire. Cela engendre le fait de pouvoir considérer que l’on puisse soi-même être auteur·ice de telles oppressions sans en avoir conscience, pour pouvoir agir sur ces comportements.
- Reconnaître légitime et ne pas pathologiser la différence.
- Visibiliser les diversités et des modèles d’identifications positives pour développer un environnement sécurisant et accueillant. Montrer des signes d’inclusivité dans l’espace, dans le langage, dans les rapports interpersonnels, en ligne, dans les formulaires, etc.
- Veiller à questionner la personne sur ses identités et modes de relations uniquement lorsque c’est nécessaire et d’une façon qui laisse la place aux réponses dans leurs diversités.
Dr. Charline Marbaix : « Dans mes questionnements, je formule d’une façon à laisser l’espace pour que les personnes puissent dire, ou non, leur orientation par exemple. Cela passe par l’utilisation de vocabulaire plus neutre ‘votre/vos partenaire(s)’ et non ‘votre mari, par exemple. Dans certaines situations, comme celle d’un dépistage IST par exemple, alors je poserai des questions très précises ‘je dois faire un frottis à cet endroit-là, donc je dois savoir ce que vous faites avec cet organe-là’».
« J’expliquais que je n’étais pas qu’hétéro. Elle voulait bien faire mais elle avait une réaction de surprise. Elle me posait des questions. Ça m’a mis mal à l’aise qu’elle soit mal à l’aise. J’avais des difficultés, mais pas sur mon orientation sexuelle… mais elle se focalisait quand même là-dessus. » (1)
- Questionner les biais systémiques de pouvoir et la position de soignant·e, faire preuve de pédagogie et veiller activement à l’obtention du consentement.
Dr. Charline Marbaix : « D’une manière générale, faire attention à demander si la personne est d’accord que je la touche, que je l’examine, que je regarde à cet endroit-là. C’est dire ‘est-ce que tu es confortable d’enlever ton t-shirt ?’ et si ce n’est pas le cas, on fait autrement. Il faut prendre le temps, être pédagogue, répondre aux questions, s’excuser si on fait une erreur. C’est aussi repenser le rapport d’autorité, pouvoir dire lorsqu’on ne sait pas et se renseigner ensuite pour revenir vers la personnes avec les informations nécessaires et adéquates.»
Valentin Blaison, travailleur à Ex-Aequo (7) :
« N’oubliez pas qu’il faut beaucoup de courage pour informer les autres, en particulier les personnes en position de pouvoir relatif, que ce qu’elles ont dit est/était offensant. Se faire corriger ne doit pas être vu comme une critique mais plutôt comme une occasion d’apprendre.
Voici quelques étapes simples à suivre lorsqu’on vous reprend :
1. Prenez du recul
2. Excusez-vous rapidement
3. Remerciez la personne
4. Passez rapidement à autre chose
5. Faites le travail de votre côté, essayez de ne pas prendre ce qui est dit personnellement, le sujet de ce face-à-face étant ce que vous avez dit, pas vous en tant que personne.
De trop longues excuses mettent l’accent sur vos sentiments plutôt que sur ceux de la victime. Il est préférable de remercier la personne que de s’excuser pendant longtemps.
« Désolé. Merci de me l’avoir dit, je ferai plus attention la prochaine fois. »
Prenez note de ce qui s’est passé et essayez activement de comprendre et d’empêcher que cela ne se reproduise.»
On n’a qu’à bien se tenir !
Quels sont les éléments-clés d’une posture professionnelle inclusive ?
Sources
- Témoignages recueillis pour ce guide
- L’inclusion des personnes LGBTQ2+ - Guide pratique pour des municipalités inclusives au Canada et ailleurs dans le monde (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, 2019)
- Au-delà de la binarité - Une note d’orientation pour l’inclusion des personnes LGBTI dans les activités de développement (Partenariat canadien pour la santé des femmes et des enfants, 2021)
- Note de lecture – Health 4 LGBTI – Observatoire du sida et des sexualités. (Régny M., 2018)
- Entretien réalisé avec Dr. Charline Marbaix pour ce guide
- Entretien réalisé avec Cécilia Goodman (Go To Gyneco) pour ce guide
- Entretien réalisé avec Valentin Blaison (ExAequo) pour ce guide